Pour une alternative au Grand Paris
Introduction
Ce texte a aujourd’hui une valeur historique. Il s’agit du fruit d’un an de travail de la commission aménagement du territoire EELV Ile France. J’ai adhéré à EELV en 2010, dans le cadre de l’appel de Daniel Cohn-Bendit qui proposait de créer une vaste coopérative constituée à part égale de « Verts et non-Verts », c’est-à-dire des citoyen-nes engagé-e-s et des militant-e-s politiques. J’avais été sollicitée en tant que co-fondatrice dans les années 90 du mouvement de l’économie alternative et solidaire (EAS). En raison de mon expérience professionnelle d’urbaniste et socio-économiste spécialisée sur les questions d’adéquation Travail / Emploi sur les territoires, j’ai participé à une commission nationale EELV Aménagement du territoire qui m’a vivement intéressée.
J’ai alors proposé de créer et d’animer une Commission spécifique à notre région « Aménagement du territoire EELV Ile-de-France ». Ce collectif fonctionnait comme une sorte de « task force » informelle, destinée à outiller en idées les candidat-e-s aux élections régionales puis les élu-e-s. Elle regroupait une série de militants Verts et non Verts œuvrant sur les territoires locaux. Elle avait l’intérêt de regrouper des représentant-e-s de chaque département, et de comprendre une forte présence de militant-e-s de banlieue, notamment de grande couronne. Ce qui permettait de compenser une représentation des membres du parti EELV Ile-de-France surtout concentrée en zone agglomérée dense, avec une forte proportion de Parisiens.
La loi Grand Paris de Sarkozy avait provoqué une réaction des mouvements citoyens de banlieue très négative, qui souhaitaient sortir de l’hégémonie parisienne et prendre leurs distances avec la notion de « Métropole » très en vogue à l’époque. Pendant un an, nous avons travaillé de façon indépendante des élus, focalisé-e-s sur la production d’un grand texte proposant une vision alternative au Grand Paris. Nous sommes parti-e-s d’une proposition d’étude à l’attention d’EELV que j’avais élaborée avec un autre collègue spécialiste de l’Aménagement du Territoire IDF, portant sur « une alternative au Grand Paris », listant différents thèmes, déclinés à chaque fois en constats et propositions alternatives. Malheureusement, le parti n’a pas trouvé les financements nécessaires. J’ai repris la trame de notre proposition initiale et pendant un an, notre collectif a amendé, enrichi ce texte, thème par thème, dont j’ai été la plume. Nous avons animé une convention, suivie d’un colloque qui ont regroupé plusieurs centaines de participant-e-s et ont permis là encore de débattre et enrichir ce texte.
Nos travaux se sont ensuite inscrits dans le cadre de la préparation du Schéma Directeur de la Région Île-de-France (SDRIF). Malheureusement EELV ayant fait alliance avec le PS pour remporter les régionales était tenu à des compromis négociés avec le PS pour l’écriture du SDRIF. Les positions de notre commission indépendante se situaient largement au-delà de celles des élu-e-s, où régnait un fort courant « pro-Métropole ». C’est dans ce cadre que la plupart de nos propositions sont tombées en désuétude, malgré quelques victoires ponctuelles (sauvegarde de la partie nord du Triangle de Gonesse, de 2300 ha de terres agricoles sur le plateau de Saclay…) Par la suite, beaucoup de nos membres ont quitté EELV et continué à œuvrer dans des groupes locaux et à se battre pour défendre les principes qui sont valorisés dans ce texte. Citons notamment au nord de l’Ile-de-France le Collectif pour le Triangle de Gonesse (CPTG) dont je suis co-fondatrice, constitué en 2011 pour sauvegarder les terres agricoles du site (contre Europacity et maintenant contre la gare en plein champ de la ligne 17 Nord) et plus généralement les opposants au Grand Roissy (Non au T4) et aux JO 2024 (sauvegarde de l’Aire des Vents du parc de la Courneuve ou des Jardins des Vertus à Aubervilliers ) et au sud le mouvement Saclay Citoyen pour la sauvegarde des terres agricoles du plateau de Saclay et l’opposition à la ligne 18 Orly-Versailles. Sans compter une coordination francilienne de ces collectifs intitulée la COSTIF.
La plupart des questions posées dans ce texte reste d’une étonnante – et tragique – actualité. Il plaide pour la révision urgente d’un SDRIF totalement dépassé, compte tenu du contexte d’aujourd’hui, sanitaire, climatique, socio-économique et plus généralement écologique et sociétal. Il remet en cause le rêve mégalo de « Paris-Ville Monde » de Nicolas Sarkozy, ce que Guillaume Faburel a appelé « Les métropoles barbares ». On ne peut que regretter d’avoir laissé passer dix ans.